lundi 31 août 2015

Hiroshima / Ombre et lumière de la photographie

Hiroshima : ombre et lumière de la photographie (atomique)

Par Yoann Moreau - 03/11/2010 - 15:51
Pour que l’on puisse photographier quelque chose il faut nécessairement de la lumière, un minimum. Aux limites de la pénombre et de l’obscure, pour que le grain ne meure, il faut une source de clarté minimale : la lumière d’une chandelle, un fin croissant de lune, une trouée nuageuse vers les étoiles, un briquet crépitant sous le visage d’un fumeur. Cette lumière fragile, il m’est arrivé de l’attendre en chambre noire, avec un ami photographe spécialiste des lueurs.1. En fait, d’une manière plus générale, pour prendre une photo, il faut du contraste, un minimum de contraste. Il faut de l’obscure autant que du lumineux.
À l’occasion d’une enquête sur le bombardement atomique d’Hiroshima, je découvre que le domaine de contraste peut être largement déplacé. Ce que l’on considère en temps normal être surexposé peut, sous certaines conditions, jouer le rôle de chambre noire. Il faisait même grand soleil ce matin-là, ce jour où une ville entière est devenue un lieu propice à l’impression photographique.
Le 06 aout 1945 à 08:15:52,2 la chambre noire c’était Hiroshima toute entière. Sous l’éclair atomique, elle devint soudain tellement lumineuse, que le milieu ambiant, c’est-à-dire la luminosité quotidienne, relevait en regard de l’obscurité la plus complète. L’obturateur s’est ouvert. Une fraction de seconde. Et c’était trop.
Murs et sols ont joué le rôle de pellicule. Des personnes, des échelles, des barrières et des vannes en métal ont été photographiées. Mais seulement, et de manière irrémédiable, en négatif.
Leurs ombres ont préservé les murs de la brûlure, mais pas eux
Si l’on observe la “pellicule”, avant et après explosion, nous avons une idée macroscopique de ce qui, en général,  se produit à l’échelle micro, au niveau chimique ou électronique  :
Hiroshima et Nagasaki, deux événements parmi les plus sombres de l’histoire contemporaines, furent lumineuses. Terriblement lumineuses. Prises au flash, effaceront nous les yeux rouges ?
Que restait-il donc de ce négatif à l’échelle géographique, de cette pellicule (de terre) soumise à la photo atomique ?



  1. Il s’agit de Jonas Hörning. À l’époque, en 2001, nous travaillions en argentique. Jonas avait convertit les 9 mètres carrés de sa chambre d’étudiant, en chambre noire. Des couvertures colmataient les encablures de la porte et de la fenêtre. Ça sentait le vinaigre chez lui, en permanence. Nous travaillions aux limites du visible, et c’était véritablement des grains – et des grappes -de lumières qui apparaissaient au fur et à mesure du temps de pose de l’agrandisseur. []
  2. C’est l’heure qu’indiquait la montre de Kengo Futagawa. pour plus d’info à ce propos, voirhttp://culturevisuelle.org/catastrophes/2010/09/25/le-temps-des-catastrophes-les-figures-de-lhorloge/ []
  3. Cf,  une sélection de sites et blogs recensant des images en ligne. []






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